Le Mémorial de la Shoah vous parle

Chaque mois, le Mémorial de la Shoah vous propose un entretien avec une personnalité engagée dans la transmission de l'histoire de la Shoah.

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Par Mémorial de la Shoah
21 févr. · 2 mn à lire
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Pourquoi une exposition sur les Étrangers dans la Résistance en France ?

Le 21 février 2024, Missak Manouchian accompagné de sa femme Mélinée entre au Panthéon. Par cet acte, la France rend hommage à tous les résistants étrangers. À cette occasion, le Mémorial de la Shoah vous présente “Des Étrangers dans la Résistance”, une exposition sur le combat des étrangers pour la Libération de la France.

Interview des commissaires de l’exposition “Des Étrangers dans la Résistance en France”, Denis Peschanski, directeur de recherche émérite au CNRS, Équipex Matrice, Programme 13-Novembre, et Renée Poznanski, professeure émérite, département des Politiques et Gouvernements, université Ben Gourion du Negev.

Mémorial de la Shoah : Il y a 80 ans, jour pour jour, Missak Manouchian a été fusillé avec 21 de ses compagnons de résistance au Mont-Valérien, comment retracer sa trajectoire ?

Denis Peschanski : Comment comprendre Missak Manouchian si on ne prend pas en compte le génocide des Arméniens ? Il est né en 1906. Orphelin du génocide arménien, il va se retrouver en France en septembre 1924, parce que la France a besoin de main-d’œuvre pour se reconstruire, ce n’est pas du tout un travailleur illégal. En 1934, il va adhérer au parti communiste et, à partir du 17 octobre 1939, il va s’engager jusqu’au début de l’année 1941. Et, sous l’occupation allemande, tout à fait naturellement, comme beaucoup d’étrangers communistes, il rejoint la résistance. Il rentre dans “le groupe de langue arménien de la main d’œuvre immigrée”, un groupe qu’il va très vite diriger. Il organise des actions de propagande, des actions extrêmement dangereuses. On jouait aussi sa peau dans la lutte politique ! Et, à un moment donné, parce que le parti communiste cherche à renforcer la lutte armée à Paris, Manouchian rentre en février 1943 dans les FTP-MOI (Francs-tireurs et partisans - Main-d'œuvre immigrée).

Renée Poznanski : Comme d’autres résistants étrangers, juifs ou non, Missak Manouchian était très attaché aux valeurs de la France, la France des droits de l’homme. Comme ses camarades, il s’engage pour la France libre.

Mémorial de la Shoah : Début 1944, une affiche de propagande est placardée dans tout Paris. Quel est l’objectif de l’Affiche rouge ?

Renée Poznanski : Après des mois de filature par la police française, les membres du groupe Manouchian sont arrêtés, torturés et livrés aux Allemands. Et, après un procès en huis-clos, les 23 résistants sont condamnés à mort, 22 sont fusillés au Mont-Valérien le 21 février 1944. Olga Bancic, seule femme du groupe, est guillotinée dans une prison allemande de Stuttgart.

L’Affiche rouge est un outil de propagande sur laquelle figurent les visage de dix résistants des FTP-MOI. Sur les dix, sept sont Juifs. Les nazis et le régime de Vichy cherchent à diaboliser la résistance pour en faire une organisation criminelle menée par des Juifs communistes, des “bandits de grand chemin”.

Denis Peschanski : Les Allemands vont essayer de convaincre la population française que les résistants étrangers tuent des citoyens français, des innocents, qu’ils sont une menace pour la sécurité de la France. Rappelons que les FTP-MOI avaient une obsession : tuer des Allemands. Même les collabos français n’étaient pas dans leur cible.

Mémorial de la Shoah : 80 ans après l’exécution des résistants de l’Affiche rouge au Mont-Valérien, pourquoi cette exposition mérite notre attention ?

Renée Poznanski : Dans cette exposition comme au sein des FTP-MOI, une mosaïque d’identités (des Arméniens, des Italiens, des Espagnols, des Roumains, des Polonais) se réunit autour de l’idéal de la France des droits de l’homme. Ces hommes et ces femmes qui ont résisté face à l’occupant nazi étaient animés par des valeurs résolument universalistes, par un socle commun.

Pour aller plus loin :

Exposition « Des Étrangers dans la Résistance en France »

🎟 Entrée gratuite

📍Mémorial de la Shoah de de Paris

Avec Missak Manouchian, accompagné de Mélinée, ce sont tous les résistants étrangers qui entreront au Panthéon le 21 février 2024. Qu’ils soient réfugiés politiques ou immigrés économiques, naturalisés, voire nés en France, ces hommes et ces femmes, dont de nombreux Juifs, ont combattu en France métropolitaine mais aussi dans les colonies et à l’étranger et ont joué un rôle crucial dans la Résistance contre l’Occupant et le régime de Vichy.

Pour accompagner cette Panthéonisation d’une dimension résolument universaliste, l’exposition centre son propos sur les FTP-MOI parisiens tout en l’élargissant aux diverses modalités de l’engagement résistant des étrangers. De diverses mouvances politiques, au sein de la résistance intérieure comme de la France libre, c’est autour de la France des droits de l’homme, de la France des Lumières que se sont combinées ces identités plurielles.

Informations pratiques : 

17 rue Geoffroy l’Asnier – 75004 Paris

Tél : 01 42 77 44 72

Du dimanche au vendredi de 10h à 18h. Nocturne le jeudi jusqu’à 22h